Édito n°12 bis – Mai 2014

APRÉS SÉVILLE ET PALAVAS… SAN ISIDRO ARRIVE

La corrida de MIURA, à la date inhabituelle du dimanche de Pâques, ouvrait l’abono de la Feria de Séville 2014. La présence des toros de ZAHARICHE en ouverture, alors qu’ils clôturaient traditionnellement la Feria des Farolillos le dimanche, démontre que l’empresa de Sevilla était sur la défensive en essayant, par ce changement, de reprendre la main face à l’agressivité du G5. Eux avaient « mis le paquet » en proposant, en collaboration avec l’empresa de MALAGA, la « commémoration » du centième anniversaire du mano a mano JOSELITO-BELMONTE comme référence, par celui des figuras emblématiques dans la démarche anti CANOREA = MORANTE et EL JULI. Les deux groupes se sont affrontés en utilisant tout l’arsenal médiatique, mais en fait, ce jour-là, personne n’a gagné.

L’empresa de SÉVILLE, malgré l’énorme sympathie actuelle des aficionados sévillans pour Manuel ESCRIBANO, ne disposait pas des armes nécessaires pour organiser, avec l’aide des MIURA, l’évènement suffisant pour affronter l’initiative du G5 qui de son côté, pour contrarier la démarche de l’empresa PAGÉS-CANOREA, avait même organisé des autobus gratuits et des prix préférentiels attractifs pour attirer des aficionados sévillans à MALAGA : mesquin ou mercantile ? Au niveau financier, ce jour-là, ils ont tous gagné : la Maestranza, presque pleine, avec un prix de revient bien inférieur aux cartels habituels du dimanche de Pâques et MALAGA frôlait le « no hay billetes« . Par contre, au niveau image, ils sont tous déficitaires et l’aficion, une nouvelle fois, a été perdante car les deux spectacles ont été médiocres (voir édito antérieur). Cependant, globalement, le G5 a réussi à perturber fortement l’ambiance de la Feria Sévillane 2014 qui a débuté dans un climat d’incertitude désagréable. Le public «branché» traditionnel des grandes férias, savait que les «galactiques» seraient absents et que leur remplacement ne serait pas facile, tant au niveau médiatique que dans la capacité tauromachique. Cette absence s’est bien entendu ressentie tant au niveau de la fréquentation, à l’exception du dimanche de Pâques et de la corrida des Victoriano DEL RIO, avec PONCE, CASTELLA et ADAME qui ont enregistré une entrée satisfaisante ainsi que les toreros « people » du samedi : CORDOBÉS, PADILLA et FANDI.

Aucune autre entrée ne s’est approchée du plein, même dans les journées plus fortes des Farolillos (mardi, mercredi, jeudi) qui traditionnellement amènent la foule aux casetas de la Feria de SEVILLA.  Au niveau artistique, seul Diego VENTURA a ouvert la Porte du Prince (pour la 9ème fois) dans un spectacle impressionnant de technique, mais aussi de prise de risque du Rejoneador de la Puebla del Rio, qu’il impose aussi à ses chevaux.

L’autre évènement qui a marqué cette Feria est la faena exceptionnelle, la maîtrise, la domination aux banderilles et à la muleta, sans oublier l’expression artistique dans des naturelles relâchées et inspirées, d’Antonio FERRERA face à un bon Victorino MARTIN le dernier jour de la feria. Nous ne détaillerons pas sa faena, même si les derechazos effectués sans l’aide de l’épée, plantée symboliquement dans l’albero du ruedo de la Maestranza, ont créé un délire dans les tendidos. Nous voulons mettre en avant le spectacle à la fois baroque, technique et la maestria du Toreo Extremeño qui a causé à l’ensemble du public une émotion considérable. Cela confirme que ce Maestro, que certains aficionados mais surtout certains « spécialistes » ne mettent pas à sa juste valeur, est arrivé à un niveau exceptionnel de maturité après 17 ans d’alternative. Ses faenas de la San Isidro 2013, face aux Adolfo MARTIN, que certains ont essayé de minimiser pour laisser la place aux figuras « modernes » fortement « médiatisées » avec des budgets astronomiques, auraient dû faire d’Antonio FERRERA le triomphateur incontestable de la Feria de MADRID 2013. Mais la complicité passive d’une partie du public, influencée par les mêmes « spécialistes » et de la Présidence, ont privé Antonio de la sortie en triomphe alors que les deux faenas étaient impressionnantes, surtout devant de tels adversaires.

Nous l’avions déjà signalé dans les éditos de 2013, mais après l’actuation de SEVILLA, nous nous sentons obligés de le répéter. Heureusement, l’Ayuntamiento de MADRID vient d’effacer cette injustice en lui remettant le prix du triomphateur de la San Isidro 2013 en même temps qu’Adolfo MARTIN recevait le trophée du Toro le plus brave.
Il faut noter que la Communauté Autonome de MADRID en a profité pour remettre à Victoriano DEL RIO le prix au lot de toros le plus complet en présentation et en bravoure, confirmant notre propre appréciation dans nos éditos antérieurs. Heureusement que, de temps en temps, des jurys »indépendants » savent mettre en valeur certains toreros injustement négligés par les médias et la mode.

Pour en revenir à la Feria de SÉVILLE, nous remarquerons que les jeunes sévillans, Esau FERNANDEZ et surtout Javier JIMENEZ (le jour de son alternative) ainsi que Joselito ADAME ont coupé une oreille. De son côté, David MORA a utilisé à minima les qualités exceptionnelles – « demasiado bueno » comme diraient nos amis espagnols – de NIÑITO de la ganaderia EL PILAR qui a mis en valeur les fondamentaux de ses origines ALDEANUEVA. Nous estimons que David aurait dû obtenir un triomphe historique qui aurait pu marquer sa carrière devant un tel adversaire dont les qualités étaient parfaites pour le toréer dans les critères de la corrida moderne.  Malheureusement, il s’est contenté d’accompagner la charge répétitive et inlassable de son colorado, couleur de robe très typique de cet encaste créé par Matias BERNARDO, ganadero historique de SALAMANCA, à partir des origines Juan Pedro DOMECQ de l’élevage de Doña Maria GARCIA FONSECA. Il n’a pas pu ou pas su donner la grandeur, la dimension artistique que demandait la charge d’un tel toro.

Enrique PONCE a démontré, après son triomphe et sa blessure des Fallas de VALENCIA, que depuis la fin de temporada 2013, il a repris son ambition pour rester dans le peloton des grands. C’était parfait et majestueux mais l’épée l’a privé des trophées.

Manuel ESCRIBANO n’a pu renouveler son succès de 2011 à SEVILLA, malgré une volonté évidente et l’amélioration notable de son toreo, tant au capote qu’à la muleta, reconnue par tous les commentateurs « indépendants ». Il est dommage que le Président ne lui ait pas reconnu ses mérites devant son 1er JANDILLA en lui octroyant une oreille méritée et demandée très majoritairement par le public qui su le lui démontrer en accompagnant sa vuelta al ruedo par une ovation tonitruante. Certes, son épée n’était pas parfaite mais elle l’était tout autant que celle de David MORA devant NINITO de Moïse FRAILE.
La veille à PALAVAS, ESCRIBANO avait confirmé au public présent dans les arènes, ses qualités de volonté, d’entrega que nous lui connaissons, mais aussi son temple, son esthétisme, sa planta torera tant à la muleta qu’au capote. Il a affronté les deux meilleurs toros de Robert MARGE dans son mano a mano avec Antonio FERRERA. La fanea de son premier aurait pu se conclure par 2 oreilles, même si le toro est allé à menos durant la faena de muleta. Il dut se contenter d’une seule à cause d’une estocade défectueuse à sa première entrée à matar. Devant le 6ème, il utilisa très bien les qualités du joli toro « salpicado sardo » de l’élevage des Monteilles, particulièrement dans une grande faena de muleta, tant dans ses derechazos que dans ses naturelles.
Nous ne rentrerons pas dans la querelle de la décision de la présidence d’indulter le toro. Il est certain que FISCAL est un excellent toro, dont nous n’avons pas assez vu les qualités dans le premier tiers pour convaincre la majorité du public. Il faut espérer qu’il deviendra un bon semental reproducteur, s’il arrive à transmettre ses qualités fondamentales indéniables à sa future progéniture que Robert MARGÉ ne manquera pas de tester.

De son côté, Antonio FERRERA a coupé 2 oreilles (1+1) durant ce mano a mano face à des adversaires moins brillants et avec une charge plus courte qu’il a su utiliser grâce à son métier, animé par sa volonté d’accompagner son compagnon de cartel dans une sortie triomphale.  Il est regrettable que le public n’ait pas été plus nombreux (1/3 d’arène). Par contre, si les autres corridas de PALAVAS ont enregistré une meilleure affluence, le résultat artistique a été décevant pour BAUTISTA, CASTELLA et PERERA, gênés pas un vent violent et par le comportement décevant des Juan Pedro DOMECQ. De même si les Rejeonadors Pablo HERMOSO et Andy CARTAGENA sont eux sortis en triomphe, il faut noter la faiblesse des toros des Hermanos SANPEDRO.

La date tardive de Pâques a eu pour conséquence de placer la Feria de San Isidro juste après celle de SÉVILLE qui se déroule cette année en mai. Nous avons voulu avancer la parution de cet édito pour concentrer dans notre prochaine parution, la Feria de San Isidro, la plus longue mais aussi la plus importante du monde taurin.

Avant de nous quitter, nous notons la reprise en Europe de Jose TOMAS qui commencera à GRANADA le 19 juin, avant la sympathique Feria de LEON avec un cartel prestigieux : Juan MORA, Jose TOMAS et FANDIÑO. Enfin, nous avons pu parler de toro, mais nous reprendrons sur le prochain édito l’évolution des dernières nouvelles locales, en plus de San Isidro.

P.S. Nous venons de voir sur internet les cojidas et cornadas impressionnantes de Sébastien CASTELLA à OSUNA, de David MORA, JIMENEZ FORTES et NAZARE à Madrid. Nous leur souhaitons de récupérer rapidement de leurs blessures pour reprendre la temporada en bonne condition.  A noter qu’à MADRID, la corrida concernée a dû être arrêtée après le 2ème toro, par décision du corps médical, devant l’incapacité des trois toreros de revenir combattre dans le ruedo.

Le responsable de rédaction : Francis ANDREU
Edito n° 12 bis – Mai 2014