ÉDITORIAL AOUT 2020

JOURNÉES EUROPÉENNES DU PATRIMOINE 2020
19 et 20 SEPTEMBRE

HALLELUJAH !

Alleluia, Alleluia, Alleluia, Alleluia,
Tu dis que j’utilise le nom en vain
Je ne connais même pas le nom
Mais au fond qu’est-ce que ça peut te faire ?
Il y a un éclat de lumière dans chaque mot
Qu’importe que tu entendes
Saint ou meurtri l’Alleluia
Alleluia, Alleluia, Alleluia, Alleluia
(Léonard Cohen 3ème strophe)

Pendant que se déroulait le Festival caritatif du 16 août qui clôturait ce si particulier Le Sud est à Béziers, j’entendais au fond de moi avec sérénité, ce cri de louange et de joie, ces paroles et cette mélodie auxquelles s’intègre la signification sacrée. Je préfère l’interprétation originale de Léonard Cohen pour son mythique Hallelujah, avec son texte, sa voix et son intensité sereine. Il disait, saints ou meurtris, tous les Alleluia ont la même valeur.

Oui, j’étais dans une joie intérieure profonde car j’ai pu revivre dans ces deux heures aux arènes, comme un rituel mystique, la mémoire et le rêve de tant d’histoires, tant de passés glorieux, avec les efforts de tant d’aficionados biterrois, avec leur passion, pour que leurs émotions puissent vivre dans le cadre qu’elles méritaient. Cela représentait pour moi ce renouveau que j’attends de tous mes vœux. Nous vivons une époque difficile au niveau sanitaire qui touche toutes les activités. Nous subissons par ailleurs les attaques d’animalistes perturbés ou manipulés, mais aussi les arrière-pensées trop visibles de groupes financiers avec des vues futuristes intéressées qui démontrent bien le complot. Combien de politiques vont-ils se laisser manœuvrer, préoccupés par leur opportunisme électoral ?

Dans ces circonstances, il me paraissait impossible de mettre deux jours de suite 5 000 personnes dans nos arènes, avec le règlement sanitaire imposé. Les aficionados qui avaient voulu malgré tout être présents, avaient compris qu’ils se devaient d’assister et de participer à ces deux tardes symboliques, avec un engagement personnel et collectif. Le résultat, rattaché à leur amour pour la corrida, était accentué par l’objectif caritatif en soutien à l’équipement des soignants. Tous les acteurs ont joué leur rôle dans ce sens.

La Lyre Biterroise, après la Marcha Real, hymne écouté avec attention par les toreros espagnols étonnés, joua la Marseillaise chantée à pleine voix par l’ensemble du public conscient des circonstances. Elle accompagna les faenas de morceaux étonnants comme le Boléro de Ravel ainsi que l’Amour est un oiseau rebelle de Carmen. Ils ont démontré que cet évènement permettait et nécessitait des initiatives qui sortent de l’ordinaire.

Je félicite et remercie tous les toreros associés dans leur démarche autour de Sébastien Castella, les ganaderos qui avaient envoyé un bétail de qualité adapté aux circonstances. Tous voulaient que le résultat artistique soit à la hauteur de l’objectif des organisateurs et des aficionados. L’indulto du toro de Margé, toréé magnifiquement par Miguel Angel Perera, ajouta de la majesté à cette ambiance, sans oublier le 7ème toro avec la participation de tous les toreros. Ceux qui étaient présents à 13 heures au Musée Taurin pour la réception des six toreros du festival, en présence de M. le Maire, de la députée et du directeur de l’hôpital, ont senti qu’il se passait un évènement inhabituel.

La signature du livre d’or de l’Union Taurine par Léa Vicens, Sébastien Castella, Miguel Angel Perera, Manuel Escribano, Paco Ureña et Carlos Olsina, présageait que nous assisterions à une tarde du 16 août exceptionnelle. Déjà la veille, le maire de Béziers avait su répondre aux invectives du groupe de trublions anti-corridas, convoqués par leurs leaders, pour essayer de nous perturber. La qualité et la détermination des déclarations du premier magistrat ont été suffisamment claires pour rappeler la place historique de la corrida à Béziers et la valeur humaine des aficionados locaux. Ce public sut d’ailleurs apprécier la très intéressante corrida du 15 août, avec les toros de Bohorquez et de Robert Margé et les figuras Léa Vicens, Enrique Ponce et Sébastien Castella.

La clôture de ces journées du Sud fut émouvante avec l’hommage à Robert Margé, après 32 ans de gestion des arènes biterroises. Elles ont démontré, sur les trois spectacles taurins, que les arènes de Béziers peuvent et doivent vivre avec intensité pour que l’on rende à ce monument si symbolique, la grandeur et la majesté qu’il mérite, quand nous pourrons avoir une vie sociale normale. L’organisateur, la ville et les aficionados auront, chacun à leur niveau, la responsabilité de le confirmer. Il est vrai que ces derniers jours, la presse locale a beaucoup écrit sur le changement de fonctionnement suite à la fin du contrat de Robert Margé. J’ai lu et entendu beaucoup de commentaires mais je ne souhaite pas intervenir dans le débat, comme j’ai pu le faire par le passé. J’ai déjà écrit à plusieurs reprises ma vision sur la gestion des corridas dans les arènes françaises, en particulier celles de Béziers, étant donné les pratiques qui s’appliquent sur notre territoire, tant au niveau fiscal que pour le règlement de l’Union des Villes Taurines Françaises. Pour moi, le problème prioritaire n’est pas le choix des hommes. Il existe des compétences et des affinités qui sont propres à chaque ville. La première décision est le choix du système de gestion. C’est une décision propre à chaque arène. Chacun a sa conception, ses exigences, ses expériences, ses connaissances sur ses arènes et ses aficionados. J’ai les miennes et j’ai pu les comparer, après avoir organisé personnellement en France et en Espagne plus de 100 corridas et novilladas piquées. J’ai connu tous les régimes de fonctionnement prévus dans la règlementation d’organisation liés aux collectivités (régie et délégation de service public) ou aux propriétaires privés. On peut avoir ses préférences. J’ai déjà donné les miennes mais je n’en débattrai pas pour éviter la polémique. Le problème majeur est le fonctionnement des organismes locaux conformément au règlement de l’UVTF. Lo Taure Roge conclue très bien ses commentaires Pour qui les arènes de Béziers ? Quelle que soit la solution retenue dans le contexte sociétal, la future empresa ne devra pas oublier l’existence à Béziers d’une Commission Taurine Extra-Municipale, d’une école taurine, de clubs taurins… donc une nécessité de travailler ensemble.

Les journées des 15 et 16 août d’une aficion motivée et réunie confortent son analyse. Ceux qui ont une conception dominatrice et méprisante face à l’aficion, qui n’est pour eux qu’une clientèle, passeraient à côté, même avec quelques succès ponctuels qui ne durent pas. Les exemples sont beaucoup trop nombreux. La fidélité d’un public ne s’achète pas. Elle se gagne.

Le responsable de rédaction : Francis ANDREU – édito n° 87 – Août 2020