Édito n°11 – Avril 2014

NOUS ESPÉRIONS ENFIN, VOUS PARLER UNIQUEMENT DE TAUROMACHIE PURE, MAIS..!

L’actualité nous oblige à aborder à nouveau des sujets médiatiques, tant au niveau des exécrables pratiques du marketing taurin qu’au niveau de l’annonce du rachat des arènes de Béziers par un groupe financier.
En ce qui concerne le marketing taurin, nous nous limiterons à vous faire remarquer que le Juli continue à faire des déclarations qui relèvent, soit de la mégalomanie, soit d’artifices communicants ridicules.  Ses Conseils en la matière, devraient se rendre compte qu’il commence à dépasser les bornes ( ou est-ce volontaire ? ).  Après avoir proclamé pompeusement lors de la présentation tant annoncée de sa temporada 2014 son engagement immortel pour les beaux-arts, il confirme après l’annonce du cartel phare du dimanche de Pâques à Malaga, son mano a mano avec Morante de la Puebla, sa demande à Dieu que ce jour-là, les circonstances aident les deux maestros à s’enrichir mutuellement (nous supposons que cela concerne l’art, l’inspiration, la génialité…) et que les spectateurs sortent des arènes en toréant. Ce jour-là, il n’oublia pas de rappeler la référence du premier mano a mano Joselito-Belmonte qui se déroula dans les arènes de Malaga le 28 février 1915.
Il faut que ses amis l’arrêtent car s’il continue à être aussi désagréable, nous pourrions, après d’autres, oublier l’admiration que nous avons de son toreo dominateur, poderoso, basé sur sa connaissance innée du toro et poussé dans son désir louable d’être le numéro 1.
Nous terminerons ce commentaire car cela ne mérite pas plus.

En ce qui concerne les arènes, nous nous sommes refusé à commenter en pleine campagne électorale, la mouvance créée autour de l’avenir des arènes de Béziers, car nous pensions que le rôle du maire sorti des urnes de ce mois de mars 2014 serait primordial dans l’avenir sur ce sujet qui intéresse l’aficion, mais aussi la politique culturelle de la ville. En effet, l’annonce fortuite de l’offre d’achat de la majorité des parts de la Société des Arènes par un groupe appartenant à l’organisateur Robert Margé (appuyée apparemment par des investisseurs montpelliérains) pour un montant supérieur à 2 000 000 €, a créé l’évènement et le malaise. Cette offre parait très élevée par rapport à la rentabilité connue des arènes dont l’activité est quasiment limitée aux spectacles taurins depuis quelques années. Elle a déclenché une réaction négative de la part de certains actionnaires historiques (mais minoritaires) de la Société des Arènes S.A.
La mise sur la place publique de cette offre surprenante a eu un écho significatif dans la campagne du 1er tour, par les prises de position officielles des candidats sur un projet qui paraissait pouvoir mettre en danger l’avenir culturel et tauromachique des arènes. Même si cette affaire n’était pas censée être essentielle dans cette campagne électorale très ouverte entre les quatre candidats, elle a, selon nous, eu plus d’effet dans l’esprit d’une partie des électeurs, même non aficionados, ce que certains esprits bien pensants veulent nous le faire croire.
Mais pourquoi avoir lancé, ce que l’on pourrait appeler une OPA où le propriétaire vendeur, président de la Société des Arènes et Robert Margé ont joué un rôle majeur ?
Pourquoi lancer cette offre qui, apparemment, souhaitait passer inaperçue, avec autant de précipitations, dans une période sensible comme l’est une élection municipale ?

Quand on connaît le rôle que depuis 50 ans les municipalités successives ont joué dans le développement de la Feria, des spectacles taurins et du maintien de l’édifice permettant de relancer l’activité taurine de la ville, il paraît évident que cette affaire ne pouvait qu’interpeller les candidats à la fonction de maire. Certes, nous avions annoncé dans nos derniers éditos, l’intérêt que certains groupes financiers pourraient avoir dans l’achat ou la prise de pouvoir des arènes en propriété privée, surtout en Espagne (Cordoba, Badajoz, Sévilla, Granada…) sans oublier qu’en France, Céret et surtout Béziers correspondent à cette spécificité. Nous pourrions longuement disserter sur les objectifs de cette proposition d’achat majoritaire, irréaliste à nos yeux au premier abord.

En tant que Biterrois, il nous semble souhaitable :
– que les arènes de Béziers poursuivent leur rôle culturel (trop négligé ces derniers temps) et taurin, imprégnées de l’histoire de la ville depuis plus de 100 ans dans ce lieu prestigieux ;
– que la ville de Béziers soit partie prenante essentielle dans les programmations des spectacles et l’utilisation globale d’un tel édifice, dans lequel toutes les municipalités depuis de nombreuses années se sont investies pour le maintenir, le développer et accroître son rôle dans les activités culturelles, festives et économiques de la cité.

Si la ville réalise un accord valable avec les propriétaires, elle a deux possibilités :
1/ Après une longue période de crise, la gestion directe, dans la partie tauromachique de la ville, a donné un renouveau évident, surtout au début des années 80 avec le Comité Féria. Cette structure associative, directement rattachée à la ville, ne correspondait plus aux obligations de transparence et de suivi imposées par les règles de la comptabilité publique. Suite à un incident, Georges Fontès, alors maire de Béziers, dut dissoudre le Comité Féria en 1985 pour maîtriser l’usage des fonds publics. Il créa la Régie Municipale des Arènes qui gérait l’ensemble des activités culturelles et taurines, la partie tauromachique étant réalisée en collaboration avec l’empresa Balaña de Barcelona. Cette solution donna satisfaction, tant au niveau gestion, qu’au niveau qualité des spectacles – musicaux (Johnny, Téléphone, Goldman) – et taurins avec une présentation de toros irréprochable, digne de plaza de primera espagnole, avec des toreros de premier plan.
La gestion financière, contrôlée directement par le Trésor public et le Receveur municipal, donna satisfaction. Le fonctionnement administratif, sous la responsabilité du regretté Commandant Farret et du conseil d’administration, a parfaitement rempli son rôle, tant au niveau de l’efficacité que dans la gestion, démontrant la fiabilité du système. La municipalité Barrau supprima la gestion en régie municipale pour adopter la Délégation de Service Public, avec des intervenants différents tous les ans et créa pour animer la tauromachie, la Haute Autorité composée de plus de 30 membres, pour insuffler les orientations de la politique taurine à Béziers. Comme aurait dit Georges Clemenceau  « Quand je veux noyer un problème, je crée une Commission ».

Actuellement, trois villes taurines françaises importantes gèrent les arènes (spectacles taurins) en régie municipale : Bayonne, Dax et Mont-de-Marsan, selon des modalités différentes mais avec la même rigueur de la comptabilité publique et un suivi exigeant des commissions taurines. Il faut préciser un avantage financier de la Régie municipale : les spectacles – limités à six) sont exempts du versement de la TVA (20 %) pour la corrida –  ce qui permet de faciliter la gestion et de la répercuter éventuellement pour avoir des prix de places plus accessibles.
La solution peut être efficace avec une équipe technique compétente et un partenaire suffisamment puissant et reconnu pour faciliter les négociations avec les représentants des toreros et les éleveurs. Elle garantit la transparence, même si les règles de la comptabilité publique sont nécessaires mais un peu lourdes à appliquer dans le monde taurin.

2/ La solution de la Délégation de Service Public (D.S.P.) n’est pas à écarter si elle est bien mise en place :
– appel d’offre public qui impose un cahier des charges fixant les critères retenus pour le choix,
– expérience professionnelle,
– fiabilité financière,
– qualité et quantité des spectacles,
– valorisation de l’offre financière proposée par l’adjudicataire,
– autres propositions : école taurine, initiatives culturelles…

Quelle que soit la solution choisie, tout dépend des compétences et de la fiabilité des hommes chargés du fonctionnement et du contrôle. Il ne faut pas oublier aussi, le rôle primordial joué par la Commission Taurine extra-municipale, entité prévue par le règlement de l’Union des Villes Taurines Françaises (UVTF), présidée par le maire ou son représentant qui est responsable de l’application du règlement taurin, de contrôle – avant, pendant et après – la qualité des spectacles proposés ( présentation des toros, choix des cartels… ) et d’organiser les présidences…

Cette structure n’est valable que suivant :
– la volonté réelle du maire,
– la qualité et la volonté des membres de Commission Taurine de faire respecter l’image de nos arènes et d’imposer à l’adjudicataire les conditions de la DSP et la volonté de l’aficion locale.

En fait, nous sommes obligés de constater que la Commission Taurine extra-municipale n’a pas joué, ces dernières années à Béziers, le rôle pour lequel elle avait été créée, dans l’esprit de l’UVTF, d’autant plus que la DSP actuelle a été négociée il y a plus de 18 ans, dans des conditions très spéciales. Il ne s’agit pas, pour une Commission Taurine, de pratiquer une opposition systématique de principe aux propositions de l’adjudicataire (revancharde ou partisane), mais appuyée par la volonté du maire, de faire respecter l’image des arènes qui se répercutera sur celle de la ville et de sa féria, tout en faisant ressortir les spécificités de l’aficion locale.

Cet édito paraît aujourd’hui, sans effet sur la campagne électorale, comme nous le souhaitions. Il est diffusé après les résultats du second tour des municipales, même s’il a été rédigé plusieurs jours avant.

Parlons enfin de tauromachie avec les Fallas qui se sont caractérisées par :
– des fréquentations de public très faibles et inquiétantes pour les 4 premières corridas et novilladas. Heureusement pour l’empresa, les trois dernières ont rempli les arènes avec la participation du G5, de Ponce et Castella.
– Juli sort triomphateur des Fallas, mais l’expression artistique de sa tauromachie n’arrive pas à nous convaincre totalement.
– Ponce aurait pu contrarier son hégémonie, si sa cojida impressionnante et sa cornada à son premier toro, ne l’avaient pas arrêté brutalement.
– Les autres toreros ont eu des difficultés à démontrer tout leur potentiel car les toros ont été nobles, certes, mais sosos et parfois mansos, même si leur présentation globalement était acceptable, malgré des armures commodes pour la plupart.
Seuls les Garcigrande (très bons pour les 4 toreros de la corrida magna) et surtout les Victoriano del Rio, ont montré les vertus que nous demandons au toro bravo : agressivité, galop dans les embestidas, classe pour certains. Ce n’est pas pour rien que les ganaderias de Garcigrande et Victoriano del Rio ont été retenues pour le mano a mano du dimanche de Pâques à Malaga : Juli-Morante.

Nous retiendrons aussi le temple, la classe et la détermination de Castella, ainsi que le sens artistique de Finito (relancé par Simon Casas en l’absence de Ponce) et de Morante, meilleur capeador de sa génération, confirmant qu’il est le successeur prétendant des maestros Curro Romero et Rafaël de Paula. Manzanares a confirmé l’esthétisme de sa tauromachie, sans retrouver ses inspirations des temporadas 2011 et 2012, pour le moment. Dans un autre style, nous avons apprécié l’attitude, la prise de risque et l’aguante du jeune Jimenez Fortes et son envie de triompher.
Au niveau des novilladas, l’extremeño Garrido après son succès chez lui à Olivenza, a confirmé qu’il devrait dominer l’escalafon 2014.
En dehors des deux ganaderias précitées, nous regrettons la fadeur (soseria) des toros en général, malgré quelques individus intéressants.

Castellon arrive avec un changement complet dans le choix des organisateurs par rapport aux tentatives toristas de leur prédécesseur Enrique Paton ces dernières années qui, il est vrai, n’avait pas donné un résultat intéressant au niveau de la taquilla, ce qui causa son arrêt d’activité. On en reparlera…

Le responsable de rédaction : Francis Andreu

Edito n° 11 – Avril 2014