Édito n°108 – septembre 2022

QUE FERAIS-JE ? QUE FAIRE ?

Mes commentaires sur notre dernière Feria 2022 sont basés sur près de 60 ans de présence aux corridas dans les arènes du Plateau de Valras et de tous les pays de tradition taurine. De plus, j’ai participé directement à l’organisation de plus de cent spectacles majeurs (corridas et novilladas avec picadors) en France et en Espagne, de plusieurs manières : empresa, collaboration avec les comités des fêtes ainsi que dans notre ville sous forme de Régie Municipale.

Aficionado Biterrois, je souhaite que nos arènes enregistrent une amélioration dans la fréquentation du public pour conforter leur rentabilité, leur ambiance, la qualité des corridas et leur impact sur le public et sur l’image de la Feria. Je n’ai aucun intérêt personnel à l’organisation de l’activité taurine de nos arènes et je souhaite la réussite des empresarios choisis par la municipalité. Pour autant, je ne me désintéresse pas du type de fonctionnement qui à mes yeux, doit associer davantage l’aficion locale si on veut qu’elle participe à son succès et à son avenir. Cette année, certains Biterrois étaient à la Feria d’août de Dax… On ne motivera pas cette aficion par une annonce laconique des cartels sans aucune information ou consultation préalables de la base qui peut peser sur nos amis et les aficionados qu’il faut reconquérir. M. le Maire affirme son intérêt sur l’activité tauromachique des arènes, je puis le comprendre. La solution ne viendra pas toute seule. Le choix d’une empresa classique qui a été fait n’empêche pas ces professionnels de faire mieux participer l’aficion locale. Elle est sensée bien connaître les fondamentaux de son arène et de son public pour appuyer les démarches de l’organisation qui doit avoir le dernier mot sur les décisions finales, en pleine connaissance de tous les éléments du marché.

Pour mieux illustrer la situation, nous pouvons approfondir la dernière Feria. Elle nous a apporté beaucoup de déception avec les toros des figuras, tant les deux Bohorquez de Léa Vicens que les Victoriano qui étaient censés avoir le fond de race pour permettre à Manzanares et Andrès Roca Rey de briller pour lancer la Feria. Ces six toros ont déçu par leur tendance à rajarse en tablas (se défiler), refusant le combat et ne permettant pas de faena intéressante. Le 6ème donna illusion mais je considère que c’est Andrès qui sut le provoquer au début de sa faena de muleta par un enchainement magnifique et très risqué de 6 passes très ajustées. Positionné sur la ligne des Tercios, il sut provoquer et extraire le toro des barrières où il s’était réfugié comme ses congénères. Le toro, se sentant agressé mais dominé par cette volonté d’engagement total du jeune Maestro péruvien, a accepté le contact comme s’il n’avait pas d’autre alternative. Le torero aurait coupé les 2 oreilles après cet exploit sans les échecs à l’épée. Il faut noter que les Victoriano del Rio lidiés à Béziers ce 12 août sont certainement les plus décevants de cet élevage dans cette temporada. Je me rappelle avoir remarqué aux corrales l’attitude d’un fils de Victoriano que l’on pouvait, a posteriori, qualifier de soucieuse. L’élevage du toro bravo n’est pas une science exacte mais 4 sur 4 ! Pour vous parler des Algarra, ce sera bref. Ils ont montré, comme pouvaient le craindre les aficionados Biterrois, une soseria, une absence totale d’agressivité. Cela donne une corrida ennuyeuse, sans émotion d’autant plus que les toreros, dont El Juli, n’ont pas montré de volonté pour compenser cette absence de fiereza et un engagement que mérite le public. Conclusion : une tarde sans intérêt qui ne mérite pas le nom de corrida d’autant plus que le physique des toros était limité. Par ailleurs l’oreille coupée par Aguado ne vaut que pour les statistiques du jeune sévillan.

Après cette corrida, le public et l’aficion étaient très déçus. Heureusement, la corrida de Margé a confirmé ses nettes améliorations de bravoure, de mobilité et même de noblesse (4/6) qui ont permis au public de voir une corrida pleine d’agressivité et de mobilité dans un combat profond avec les toreros, comme les aime le public de Béziers. Je pense que les toros méritaient mieux même si Lopez Simon a confirmé son professionnalisme avec la volonté de maintenir son image de 2021 chez nous alors que Ferrera reste dans sa tendance trompeuse que je lui reproche malgré des exceptions.

La joie des Biterrois fut de retrouver un bon lot de Miura, tout en trapio, en charge et mobilité qui a permis des faenas à Lopez Chavès et Ruben Pinar. Le deuxième était plus compliqué mais surtout le 6ème qui a rendu au public la sauvagerie ancestrale des toros de Zahariche. Le public sortit enchanté des arènes et les Miura redonnèrent, après les Margé, cette émotion et ce combat qu’il attend. Je sais que certains aficionados ont même eu les larmes aux yeux de retrouver cette lutte ancestrale qui leur manquait avec leurs qualités et leurs défauts même s’ils ne permettaient pas tous aux toreros de triompher.

Devant ces constats trop typiques de nos arènes, la solution repose sur les ganaderos et les toreros qui doivent respecter nos arènes. Il faut aussi tenir compte de l’absence de Sébastien Castella, le grand Maestro de Béziers dont nous attendons le grand retour. Il devrait faciliter la constitution de cartels de haut niveau qui entraînent la présence de maestros avec la competencia nécessaire. Il est nécessaire de faire appel à des toreros attachés à nos arènes. Rappelons-nous à partir de 1970 les irremplaçables comme Paco Camino, Paquirri, Nimeño II, Espartaco, Richard Milian, Paco Ojeda, Damaso Gonzalez, Victor Mendez, Enrique Ponce, Sébastien Castella que le public a adorés.

En 2023, il y aura de nouveaux jeunes qui pourront entrer en concurrence chez nous pour créer une arène de référence. Nous pouvons citer Daniel Luque, Tomas Rufo, Paco Ureña, Juan Leal, Angel Tellez, Leo Valadez… et espérer l’alternative de Christian Parejo qui est apprécié du public biterrois.

Ce ne sont que des simulations qui s’attachent à démontrer que la relève existe, si certaines figuras ne montrent pas un intérêt pour nos arènes. Quant aux ganaderias, l’empresa doit en trouver correspondant au goût de notre aficion sans recevoir de vétos des toreros. Plusieurs ne sont jamais venues : Paralejo, Jandilla, El Pilar, Valdefresno (indulto Cara Alegre à Béziers), Pedraza de Yeltes et les Santa Coloma : La Quinta, Ana Romero, Rehuelga ou les anciens encastes revenus Jose Vazquez, Francisco Galache. C’est un problème de confiance et de respect avec l’empresa. Quand une ganaderia même fameuse n’a pas sept toros pour faire un lot homogène, elle ne doit pas l’embarquer comme Victorino et Miura qui malheureusement en 2017, perdirent leur mémorable ancienneté dans nos arènes. Ces corridas font beaucoup de mal auprès du public si elles se répètent ou les sauver comme cette année.

La corrida en France est en danger face à certaines alliances prêtes à tout pour des raisons politiques face au gouvernement alors que d’autres sujets de lutte et de défense ne manquent pourtant pas quand les Verts n’ont fait que 5% à l’élection présidentielle. En fait, ces médias et intellectuels parisiens et ces unions anti-nature, soucieux de leur pensée unique invariable, veulent la perte de nos traditions ancestrales du Sud, provençales, occitanes, catalanes, ibériques, je dirai même méditerranéennes et latines. Mon édito n’a pas d’autre but que de ramener plus de public dans nos arènes grâce à la qualité mais aussi par une démarche plus concertée entre les organisateurs et l’aficion, moteur indispensable si on sait la solliciter sur des objectifs précis.

Le responsable de rédaction : Francis ANDREU – Édito n° 108 – sept 2022